CNEF : retour suite au questionnaire sur le vécu des familles d’accueil évangéliques

COMMUNIQUE DU CNEF – 18-10-2018

Madame, Monsieur,

Le CNEF a mené une enquête sur le vécu des assistantes familiales évangéliques (1). Nous remercions particulièrement tous ceux qui y ont répondu. Vous trouverez ci-dessous les résultats et les premiers enseignements à en tirer.

 

Résultats du sondage
 

Vous êtes 49 assistantes familiales à avoir répondu.

  • Une large majorité a exprimé avoir déjà manifesté sa foi en présence de l’enfant confié (écouter des chants chrétiens, prière, participation aux cultes, etc.) sans relever de difficultés particulières, ce qui illustre une marge de liberté dans la pratique.
  • Cependant, la moitié d’entre vous avez exprimé avoir déjà eu le sentiment que votre foi ou la perception des Évangéliques en France rendait votre travail difficile. De manière subjective, il y a donc une pression ressentie du fait de votre foi chrétienne, voire une contrainte.

  • 11 assistantes familiales (soit 22%) évoquent avoir vécu des difficultés liées à la foi chrétienne, soit au moment de l’agrément soit dans les conditions d’exercice de l’activité.

  • S’agissant des refus d’agrément, l’enquête révèle que, lorsque les assistantes familiales ont effectué un recours, ils ont en général obtenu gain de cause. Par exemple, lorsque le motif du refus était que le mari était pasteur ou que l’assistante familiale était chrétienne.

  • Il peut y avoir des différences d’appréciation des demandes d’agrément en fonction des départements. Un refus dans un département ne signifie pas un refus partout en France.

  • S’agissant des conditions d’exercice, lorsque des problématiques ont été soulevées (sur plainte des parents en général) en raison des pratiques religieuses  (chants ou prières à table, présence à l’église…), l’administration a effectué un rappel à l’exigence de stricte neutralité religieuse, allant vers l’interdiction de toute manifestation religieuse mais sans sanction disciplinaire. Par exemple, pour aller à l’Église en famille, les conjoints doivent se relayer.

 

Les enseignements principaux de l’enquête

Cette enquête permet un premier état des lieux rassurant concernant les restrictions faites aux assistantes familiales dans la pratique de leur foi chrétienne, leur profession s’exerçant dans leur domicile, dans leur cadre familial et de manière continue. Il semble y avoir une certaine liberté de fait. Les difficultés restent minoritaires (22%) et ont trouvé en général  une solution par voie de recours ou sans sanction contre l’assistante familiale.

S’agissant des refus d’agrément, nous encourageons donc les assistantes familiales à formuler des recours lorsqu’elles estiment être victimes de discrimination en raison de leurs convictions religieuses.

Cependant l’enquête permet aussi de mesurer le poids ressenti et réel de l’obligation de neutralité religieuse imposée aux assistantes familiales (2), qui porte atteinte au respect de leur vie privée et familiale et de leur liberté religieuse. L’équilibre est fragile sur ce point d’autant que le majorité des assistantes familiales ont des employeurs publics. Elles peuvent donc être tenues à une neutralité religieuse en tant qu’agents de l’État.

Les assistantes familiales évangéliques aspirent en effet à pouvoir pratiquer leur culte de manière raisonnable à leur domicile et en allant à l’Église.

C’est sans doute sur ce point qu’il conviendrait d’agir pour assouplir l’exigence de neutralité religieuse et permettre à la marge de liberté raisonnable vécue de fait par les assistants familiaux de devenir un droit.

En effet, les familles ne sont pas laïques, c’est à dire neutres de toutes convictions, mais peuvent tout à fait vivre leurs convictions en respectant par ailleurs celles de l’enfant placé et de ses parents. La laïcité peut se vivre dans la diversité plutôt que dans la neutralité.

Dans bien des cas, il s’agirait simplement que, bien informés, les parents de l’enfant accueilli donnent leur accord pour que l’enfant puisse participer aux activités de la famille d’accueil (aller à l’Église par ex, ou profiter d’activités de jeunesse), permettant son insertion dans le tissu associatif local. Une meilleure connaissance des Églises et oeuvres évangéliques par l’administration pourrait aussi servir en la matière. 

Toutefois, il nous semble que, pour l’instant, ces arguments sont à porter au cas par cas et non sur le plan national.

 

Les pistes actuelles
 

Le CNEF a déjà évoqué le cas des assistantes familiales auprès de l’Observatoire de la Laïcité, lors de son audition le 6 mars 2018. Une nouvelle démarche de clarification du statut de l’assistant familial afin d’obtenir une application plus souple du principe de neutralité religieuse risquerait d’entraîner une position officielle plus stricte que l’état actuel. Nous ne souhaitons pas un raidissement en la matière mais voulons continuer de travailler sur cette question sous l’angle conjugué du droit à la vie privée et familiale et de la liberté de religion. Nous sommes donc à la recherche de bonnes pratiques permettant de trouver un juste équilibre nous permettant d’être force de propositions.

Ainsi, le CNEF, avec comme partenaire les Associations Familiales Protestantes (AFP), reste attentif à la situation des assistantes familiales. Aussi, n’hésitez pas à nous informer de toute problématique ayant trait à l’expression de votre foi dans le cadre de l’exercice de votre activité d’assistante familiale.
 
Nous vous remercions de votre collaboration. 

Bien fraternellement. ​

Nancy LEFEVRE et Cherline LOUISSAINT
Juriste et juriste remplaçante du CNEF

 
(1) Le métier d’assistant familial étant majoritairement exercé par des femmes, nous parlerons ici, au féminin, d’assistantes familiales pour désigner l’ensemble des professionnels, homme ou femme…
(2) Les assistants familiaux travaillent majoritairement pour des employeurs publics.

 

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